Le terme anglais border désigne à la fois une frontière, les confins d’un endroit, ainsi qu’un bord ornemental (le mot est dérivé de “bordure”, en français). La frontière représente une limite, au sein de laquelle se trouve un ensemble ; un pays, par exemple. Le mot frontier, quant à lui, a des associations très fortes avec l’exploration et la colonisation d’espaces inconnus. Si la frontière française est une barrière qui circonscrit la France, le frontier américain est l’horizon, une zone extrême synonyme d’avenir dans les esprits. D’ailleurs, “frontière” vient du mot “front”, l’avant-garde de l’armée ; un endroit où la nation regarde vers l’avant, vers l’extérieur.
Le frontier du Far West est, pour le colon, un tremplin à la fois sauvage et sans loi, et représente davantage une opportunité qu’une restriction à nos actions. Pour les habitants des régions transfrontalières, la frontière peut être une barrière qui divise le terrain commun et empêche le vivre-ensemble.
Née en Pologne, Kasia Ozga a grandi aux États-Unis et vit en France depuis 2006. Elle pratique la sculpture, crée des installations et de l’art environnemental. Au Centre Culturel Saint-Ex à Reims, elle expose des œuvres réalisées notamment dans le cadre d’une réflexion plastique menée autour de la notion de « Border » lors de sa résidence artistique à Nekatoenea au Domaine d’Abbadia au Pays Basque en 2011.
Les racines de l’artiste étant comme réparties sur deux continents, ses œuvres sont le fruit de son propre rapport ambigu aux frontières géopolitiques et évoquent les différentes frontières historiques, psychiques et charnelles qui nous encadrent. Son travail artistique aborde le thème de border en explorant la manière dont nos identités se forment à travers notre façon de penser et de mettre en action nos propres « frontières ». Pour K. Ozga, le corps humain n’est pas seulement l’entité matérielle délimitée par l’enveloppe de notre peau, mais il nécessite la mise en place de frontières afin d’exister. Par le jeu de celles-ci, le corps humain se situe dans le temps et dans l’espace.
À travers des images, des sculptures et des installations, l’artiste s’interroge sur la nature et la matière de nos identités nées à partir des frontières que nous mettons en place.